LE SOUTIEN DES PAYS-BAS AU REGIME TOTALITAIRE DE KIGALI EST SURPRENANT


 
 Quel est le rôle du gouvernement néerlandais aux côtés du régime du Général Paul Kagame dans la parodie de justice contre l'opposante politique Madame Victoire Ingabire Umuhoza?
 Le Comité de coordination des FDU Inkingi vient d'apprendre avec surprise que le Gouvernement néerlandais vient de donner au gouvernement rwandais des documents litigieux contre Madame Victoire Ingabire Umuhoza, Présidente des FDU-Inkingi emprisonnée pour des motifs politiques au Rwanda depuis le 14 octobre 2010. Rappelons que Madame Victoire Ingabire Umuhoza est rentrée au Rwanda en janvier 2010 pour faire enregistrer son parti politique et pour se présenter aux élections présidentielles d'août de la même année. Par cet envoi dans des circonstances assez obscures, le Gouvernement des Pays-Bas s'est rendu complice d'une justice transformée en instrument d'oppression contre l'opposition démocratique. Le Ministère public rwandais a déjà déclaré qu'il aurait reçu un épais dossier de 600 pages alors que, la Cour de Rotterdam s'était prononcée le 23 octobre pour la transmission de 3 documents de moins d'une vingtaine de pages. D'où seraient venues plus de 580 pages supplémentaires alors que la police néerlandaise a déjà rendu presque tous les documents saisis au domicile de la famille de Madame Ingabire lors de sa perquisition ?

 Depuis plus de cinq ans, le gouvernement néerlandais verse plus de dix millions d'euros pour financer la restructuration et la professionnalisation du système judiciaire et de la police au Rwanda. Ces structures financées entre autres par les Pays-Bas ont été instrumentalisées par le régime pour se maintenir au pouvoir en réduisant toute l'opposition au silence. Le Gouvernement néerlandais justifiait son geste par sa confiance dans le système judiciaire rwandais qu'il a contribué à restructurer.
 
 Depuis l'ouverture du procès politique de Madame Victoire Ingabire Umuhoza, sa défense a présenté une motion sur la non-rétroactivité de la loi pénale rwandaise et sur des problèmes de compétences matérielle et territoriale de la Haute cour. Ces conclusions visaient plus de 75% de l'acte d'accusation. Le 13 octobre 2011, l'ordonnance intermédiaire de la haute cour a rejeté en bloc les arguments de la défense tout en interdisant même d'interjeter tout appel avant jugement définitif de l'affaire.
 Outre que Victoire Ingabire Umuhoza en conteste la réalité, la quasi-totalité des faits prétendus, lui reprochés, se sont passés à l'étranger, c'est-à-dire en dehors du champ de compétence de la Cour rwandaise. De même, rappelant le principe général essentiel du droit de la non-rétroactivité de la loi pénale, les avocats ont démontré que la plupart des faits allégués sont antérieurs à la promulgation des lois censées les réprimer.
 La haute cour a obligé les avocats de la défense à soumettre au préalable leurs questions de contre-interrogatoires aux témoins du procureur afin qu'ils les préparent en dehors des audiences publiques. Ce qui leur donne le temps d'actualiser leurs déclarations pour rester dans la ligne du ministère public.
 Le comité de coordination des FDU Inkingi est d'avis que ces épisodes, à eux seuls, à cause de leur extrême gravité, justifient, pour les Pays Bas, l'arrêt de toute collaboration avec la justice rwandaise. En persistant dans cette collaboration, le gouvernement donne une forte impression de collusion avec une justice irrespectueuse de l'équité et de protection d'un régime qui foule aux pieds les principes de l'Etat de droit. Il est regrettable que les fonds des contribuables néerlandais continuent de servir à financer ce régime policier. Un jour, l'histoire accusera le gouvernement hollandais d'avoir été complice d'un régime dictatorial. Nous savons que certains diplomates hollandais suivent le procès au Rwanda, mais nous insistons pour qu'une commission pluridisciplinaire éclaire le gouvernement sur l'iniquité de ce procès kangourou.

 Le gouvernement néerlandais ne serait-il pas au courant du fait que tous les opposants au régime de Kigali actuellement en prison (Ntakirutinka Charles, Mushayidi Déo, Ntaganda Bernard, Niyitegeka Théoneste ) sont tous condamnés pour des accusations similaires à celles portées à l'encontre de Madame Ingabire: collaboration avec une organisation terroriste, atteinte à la sûreté de l'Etat, divisionnisme, idéologie du génocide, négationnisme ? Le gouvernement néerlandais saurait-il que le choix présenté aujourd'hui à tout opposant politique et à tout journaliste critique à l'égard du régime de Kagame, est : soit, la mort (comme celle des regrettés Seth Sendashonga, André Kagwa Rwisereka, Jean-Léonard Rugambage), soit la prison (femmes- journalistes Mukakibibi et Uwimana Nkusi, et leaders politiques ci-haut cités), ou l'exil (la quasi-totalité des leaders de l'opposition rwandaise) ?
 
 Il est à présent légitime pour les FDU Inkingi de se demander pour quel intérêt un Etat démocratique continue de soutenir un régime totalitaire alors qu'il pourrait mieux contribuer à l'émergence d' un pouvoir partageant les mêmes valeurs démocratiques, pour des intérêts réciproques et durables pour les peuples rwandais et néerlandais.
 Pour toutes ces raisons, nous demandons au gouvernement néerlandais de :
 - constater que le procès politique de Madame Victoire Ingabire Umuhoza a perdu toute garantie d'équité et d'impartialité ;
 - cesser toute collaboration judiciaire dans le dossier de Madame Ingabire Umuhoza ainsi que dans d'autres dossiers judiciaires en rapport avec la justice rwandaise;
 - demander la libération immédiate et sans condition de Madame Victoire Ingabire Umuhoza ainsi que d'autres prisonniers politiques;
 - s'intéresser davantage au sort des démocrates rwandais et à l'ouverture de l'espace démocratique.
 
 Fait à Lausanne, le 16 novembre 2011
 
 Dr Nkiko Nsengimana
 Coordinateur