Rwanda : les plats traditionnels plus sains que ceux à l'huile (13.05.09).

 

La cuisine à l'huile, synonyme de richesse au Rwanda, n'a plus la cote auprès des citadins instruits qui redoutent les maladies cardio-vasculaires et reviennent aux plats traditionnels. Un exemple à suivre pour préserver son cœur.

Il est midi au City Valley. Les tables de ce restaurant de Kigali connu pour servir des plats typiquement rwandais se remplissent rapidement. Au menu : pommes de terre, patates douces, maniocs, grains de maïs cuits dans la marmite, pâte de sorgho avec des légumes, etc. le tout sans huile. Manches repliées pour pouvoir manger avec les mains, des hommes, cadres ou chefs d'entreprises, dégustent avec entrain. "C’est le repas de nos ancêtres qui leur permettait de vivre longtemps", assure l'un d’entre eux. Dans un autre restaurant, non loin de là, le Nile Grill , il est écrit : "Les plats sans huile se trouvent de l’autre côté", pour permettre aux clients de faire leur choix entre les deux types de cuisine dans ce même restaurant.
De plus en plus, les citadins aisés fréquentent les lieux où ils peuvent manger des plats traditionnels pour éviter les matières grasses qu'ils consomment souvent largement chez eux. "À la maison, les enfants aiment les frites, le beurre, les viandes… Nous ne pouvons pas leur imposer des repas étranges qu’ils ne connaissent d’ailleurs pas", dit Nibishaka V, rencontré au Nile Grill, qui affirme avoir été nourri ainsi dès son enfance dans la campagne. "Je ne peux pas les trahir", dit-il. Comme lui, certains citadins commencent à changer de mentalité.


Jusqu'à présent, en effet, les repas bien gras avec beaucoup d’huile étaient considérés par les Rwandais comme des plats de riches ou d'Occidentaux. "Ils sont riches ! Ils mangent chaque jour des repas avec de l'huile", entend-on souvent dire dans les campagnes rwandaises. Dans les villes, "une soirée sans menu gras est souvent symbole de crise familiale". Ceux qui mangent en grande quantité de la graisse ou de l’huile sont appelés des "blancs" contrairement aux pauvres dits "paysans" qui n’en consomment qu’en se consolant pendant les fêtes.

Protéger son cœur
Les mises en garde du corps médical font changer certains d'avis. "J’ai finalement décidé de contrôler ma cuisine, je dois protéger la santé de ma famille", dit une femme de Huye au sud, qui souffre d'hypertension depuis l'an dernier. Elle a décidé de suivre de près sa bonne qui servait des repas inondés d’huile, croyant qu’une nourriture qui en est dépourvue n’en est pas une. Le docteur André Musemakweri s’insurge contre ces préparations dans les familles ou dans les restos : "Nous passons à l'huile la pomme de terre, la banane, la viande, le haricot, etc. À la fin, la santé de notre coeur est mise en danger."
Les maladies cardio-vasculaires sont en hausse au Rwanda. Au CHU de Butaré, une centaine de patients ont été soignés pour ces problèmes de janvier à juin 2008. "67 d'entre eux ont été hospitalisés et un dixième a succombé à la maladie", a déclaré à l’Agence rwandaise de l’information, le docteur André Musemakweli, directeur de l’hôpital. Dans les campagnes, beaucoup meurent sans savoir qu'ils souffrent de ces maladies.
Comme l’ont souligné les docteurs Ganza et Nzambaza au micro de Radio Salus de l’Université nationale du Rwanda, les corps gras – l'huile et la graisse animale surtout - consommés en excès dans le beurre, le lait, les viandes sont riches en cholestérol. Lorsque celui est en excès, des plaques graisseuses se collent sur les parois des artères et les bouchent progressivement provoquant de graves problèmes cardiaques, jusqu'à l'infarctus (destruction d'une partie du cœur)…. "Les Rwandais doivent apprendre à bien manger et à se défaire de l'idée qu'un bon repas est celui riche en graisses", concluaient les médecins.


La situation est d'autant plus préoccupante qu'il n'y a pas suffisamment de médecins au Rwanda qui puissent diagnostiquer et traiter ces maladies, ni d'hôpitaux qui ont les moyens matériels de le faire. Mieux vaut donc faire de la prévention pour éviter ces problèmes. Une saine alimentation en est la première clé : consommer peu de graisse et beaucoup de fruits et de légumes est recommandé. La pratique du sport ou d'une activité physique quelconque et le contrôle régulier d’un médecin ou autre agent de santé permettent aussi d'avoir des "moteurs" robustes et quasi-infatigables. "Il faudrait également que les Rwandais se méfient de la consommation de tabac et de l'abus d'alcool", met enfin en garde le docteur Bonaventure Nzeyimana, professionnel des soins de santé au sein du ministère de la Santé.

Source/ http://www.saverwanda.org/