Le mystère du moulin magique.

Il était une fois une famille de paysans qui était très pauvre.
Un jour, la femme dit à son mari :
- Nous n’avons plus rien à manger. Demandons à notre fils d’aller chez le voisin,
il est riche et sans enfant, il lui donnera peut-être un peu de pain.
Le garçon part aussitôt chez le voisin. Ce dernier est certes très riche,
mais il est surtout très avare. Il refuse tout net. Tristement, le garçon rentre chez lui.

En chemin, il rencontre un vieil homme qui porte un énorme sac sur le dos.
- Attendez, lui dit-il, je vais vous aider, et il prend le sac sur son dos.
- Merci, brave garçon, dit le vieil homme. Pour te remercier, prends cette miche de pain.
Tu peux la manger si tu as faim, mais... les lutins de la forêt ont encore plus faim que toi.
Ils n’ont rien mangé depuis trois jours. Alors, si tu as bon cœur, porte-leur ce pain.

Le garçon hésite un instant, mais comme il a bon cœur, il porte le pain chez les lutins.
- Oh ! Merci, dit le chef des lutins. Tu es un garçon très généreux. Pour te remercier,
prends ceci. Et il met dans les mains du garçon un petit moulin pour moudre le grain,
puis il lui murmure à l’oreille :
- Ce moulin est magique. L’homme qui le possède et qui chante
«Tourne, mon p’tit moulin, tourne pour moi !» aura tout ce qu’il voudra.
Pour l’arrêter, il suffit de chanter:
«Arrête, mon p’tit moulin, arrête-toi !»

Le garçon, heureux, rentre chez lui en courant. Il appelle ses parents,
il pose le moulin sur la table et chante «Tourne, mon p’tit moulin,
tourne pour moi et donne-moi du pain !»
Aussitôt, une montagne de pain apparaît sur la table. Alors le garçon chante:
«Arrête, mon p’tit moulin, arrête- toi !» Et le petit moulin s’arrête.
Puis le garçon reprend «Tourne, mon p’tit moulin, tourne pour moi et donne- moi du riz !»
Et aussitôt des centaines de grains de riz sortent du moulin. Plus tard, il demande du lait,
de la viande et même des pièces d’or ! Mais à chaque fois le garçon est raisonnable,
il arrête son moulin dès qu’il a assez pour lui et sa famille.
Ainsi, ils vivent heureux, sans souci d’argent.

Intrigué par cette fortune soudaine, le voisin décide de leur rendre visite.
Lorsqu’il arrive, le jeune garçon est seul chez lui.
- Salut, petit ! Je t’apporte une miche de pain. - Oh ! C’est gentil à vous,
répond le garçon, mais nous n’en avons plus besoin.
Grâce à ce moulin, je peux avoir tout ce que je veux.
- Un moulin magique, s’écrie le voisin moqueur, ça n’existe pas !
- Si, si, je vais vous montrer, dit le garçon. Et il se met à chanter:
«Tourne, mon p’tit moulin, tourne pour moi et donne-moi du pain !».
Aussitôt une dizaine de pains apparaissent sur la table. Alors, il arrête le moulin.

- Incroyable ! s’écrie le voi- sin ébloui, je t’achète ton moulin, ton prix sera le mien.
- Impossible ! C’est un cadeau. Jamais je ne le vendrai.
- Dans ce cas, dit le voisin d’un ton mielleux, peux-tu me le prêter quelques jours ?
- Hum… Je vous le prête, mais pour deux jours seulement.
- Promis ! crie le voisin en partant.

Fou de joie, il court vers le port et saute dans son bateau en hurlant :
- Je vais être RICHE ! RICHE ! Je vais demander une montagne de sel à ce moulin et
j’irai le vendre aux pêcheurs qui salent le poisson. Il chante alors à tue tête :
«Tourne, mon p’tit moulin, tourne pour moi et donne- moi du sel !».
Aussitôt le moulin fait un petit tas de sel.
- Encore ! Encore ! crie le voisin excité. Et le moulin continue à déverser du sel.
Peu à peu, le bateau en est rempli, alors le voisin crie : - Stop ! Moulin, arrête-toi !
Mais le moulin continue à donner de plus en plus de sel.
Le voisin a oublié la formule magique ! Paniqué, il hurle :
- Arrête-toi, maudit moulin ! Sinon je te jette à l’eau !

Il a à peine fini sa phrase que, sous le poids du sel, le bateau coule dans la mer,
emportant avec lui le moulin et le voisin !
Arrivé au fond de l’eau, le petit moulin se pose sur un lit de sable fin et continue de fournir du sel,
Encore du sel, toujours du sel !

Et il paraît, qu’aujourd’hui encore, il tourne toujours…
Et c’est depuis ce temps-là, dit-on, que la mer est salée !!!


Librement adapté d’un conte japonais par Laurence Schmitter