RASSEMBLEMENT REPUBLICAIN POUR LA DEMOCRATIE AU RWANDA
(RDR) :
SES ORIGINES, SA
POLITIQUE ET SES ALLIANCES.
Par Servilien M. Sebasoni.
Apres l'une de ses métamorphoses, le RDR est devenu INKINGI – FDU
(ou Forces démocratiques unifiées). En se mélangeant à des
organisations « cousines », le RDR joue à cache-cache pour acquérir
une certaine crédibilité. La porte-parole de Ban Ki Moon, SG de
l'ONU, aurait dû s'informer avant de laisser le trouble gagner l'ONU
à cause d'allégations proférées par des gens sans foi ni loi contre
la nomination du Général Karake Karenzi
au vice- commandement de la
Force Hybride UN-UA pour le Darfour. Il convient de
rappeler du RDR
les origines, ce qui lui tient lieu de doctrine politique et ses alliances.
ORIGINES.
Peu après le génocide des Tutsis, en 1994, s'installait à Bukavu
(RDC alors Zaire), à la faveur de Turquoise, un «
gouvernement
intérimaire rwandais » en exil ; quant au commandement des FAR,
fidèle à sa tactique de bouclier humain, il conduisit aux environs de
Goma (Nord Kivu) une masse de Rwandais-otages
dans des camps aménagés
à la hâte par l'ONU ( HCR). Dans ces camps inhospitaliers, proches de
la frontière rwandaise, pour des raisons plus politiques que
rationnelles, le choléra allait faire des ravages.
Le Secrétariat de l'Internationale démocrate chrétienne (IDC) à
Bruxelles était prostré. Un régime « chrétien démocrate »
soigneusement mis au point depuis les années 50 et porté à bout de
bras depuis lors, venait de sombrer dans un génocide, le premier
génocide d'Afrique. On dépêcha le conseiller politique de l'IDC,
Alain de Brouwer, à Bukavu, avec une brochette de parlementaires
chrétiens- démocrates, auprès du « gouvernement rwandais en exil » ,
pour, disait-on, organiser une sorte de tribunal d'honneur et séparer
ceux qui avaient du sang sur les mains et les autres. Ces derniers
devaient être préparés à négocier avec le FPR installé à Kigali un
partage du pouvoir. Cette démarche n'a pas eu de suite. On ne sait si
la négociation échoua ou si l'envoyé de l'IDC ne trouva
personne
ayant les mains propres.
On ne sait si INKINGI (RDR et consorts), le rassemblement actuel, se
rend en Hollande le 22 septembre, pour tenter la même ordalie afin
d'acquérir la crédibilité qu'il réclame tant avec Kigali. Ce sera
bien difficile, car nombre d'entre les membres d'INKINGI
ont un ADN
charge. Qui vivra verra.
L'IDC tenta alors une autre démarche : on allait
partir de la base,
puisque la tête était pourrie, et créer un mouvement politique qui
rassemblerait les refugiés.
LE RDR fut créé par François Nzabahimana, ancien
fonctionnaire
et ancien ministre de Habyarimana au Rwanda ; il était alors refugié
en Belgique.
François Nzabahimana reçut des moyens et des
encouragements des
deux partis catholiques belges pour aller expliquer son programme
dans les camps de réfugiés rwandais en Tanzanie et au Zaire.
De passage au Nord Kivu, F. Nzabahimana séduisit par
son projet
les Forces armées rwandaises (FAR) : à l'issue de leur réunion du 28
au 29 avril 1995, une vingtaine d'officiers supérieurs demandèrent
au « gouvernement rwandais intérimaire » en exil à Bukavu de se
saborder et de remettre tous les dossiers à Nzabahimana.
Celui-ci
deviendrait ainsi le leader de tous les réfugiés et négocierait leur
retour au Rwanda. (Lettre du 29 avril 1995)
Le mouvement s'appelait alors « rassemblement pour le retour et
la démocratie au Rwanda » ; il ne prendra que plus tard la
dénomination actuelle (sans le mot « retour »), quand il devint
évident que les réfugiés rentraient nombreux par d'autres voies. Le
risque redouté était de voir les leaders du mouvement rester seuls
dans les pays d'exil. Le thème du « retour » était sans objet au
regard de la politique de Kigali : la Constitution de 2003 dans son
art. 3 rappelait le droit au retour de tout Rwandais et le droit de
tout Rwandais à sa patrie. Pour cela le Front patriotique rwandais
avait dû prendre les armes.
Il convient de noter que le père Serge Desouter, de
la Congrégation
des Pères Blancs, ancien missionnaire en Afrique, au Rwanda
notamment, a accompagné dès le début le mouvement de Nzabahimana.
Dans ses écrits il accompagne encore ses épigones ou ses descendants.
Le père Desouter, en effet, nie qu'il y ait eu un
génocide des
Tutsis au Rwanda ; il l'a écrit plusieurs fois et notamment dans un
article sur le site minorisa-inshuti et persiste à le
nier dans ses
écrits d'aujourd'hui. Nous le rencontrerons encore plus loin en
compagnie des négationnistes.
ALLIANCES.
Le RDR aime apparemment changer de nom. Lors d'une réunion à
Bruxelles (le 15 octobre 2006), le RDR a formé une fédération
dénommée Inkingi/ Forces démocratiques unifiées (FDU)
ou United
Democratic Forces (UDF), avec trois autres formations
(FRD, ADR et AJIIR).
La formation FRD (Forces rwandaises démocratiques) fut fondée en
1995, à Bruxelles, par Faustin Twagiramingu et Seth Sendashonga.
Twagiramungu, présent à la dernière réunion de
Bruxelles, semble
avoir pris ses distances et se dit simple sympathisant, (à moins
qu'il ne se tienne en réserve de la République !) en laissant la
présidence à Eugène Ndahayo.
On ne connaît à ce monsieur d'autre haut fait que d'être le fils
de son père. Il est entré en politique par héritage, un peu comme son
mentor Faustin Twagiramungu dont il fut un moment
secrétaire au MDR,
comme son père y était entré par solidarité « ethnique ». Calfeutré
soigneusement en France, il a réalisé une télé-étude
(à 8000 km du
Rwanda !!) sur « le système FPR » ; il a peut-être inspiré son
voisin le juge Bruguière pour la confection de sa télé-enquête
judiciaire sur l'avion de Habyarimana.
L'ADR-Isangano RDA (alliance démocratique rwandaise –
Rwanda
democratic alliance) est dirigée par Jean-Baptiste Mberabahizi.
Docteur
Vétérinaire de Dakar, Mberabahizi, aujourd'hui SG d'Inkingi fit,
avant 1994, un pélerinage au quartier général du FPR
à Mulindi, se
disant un socialiste de l'opposition intérieure. Il comptait, comme
bien d'autres opposants de l'intérieur, utiliser le FPR pour se
hisser au pouvoir et s'en débarrasser ensuite. « Prendre, disait-il,
le véhicule FPR pour aller à Kibungo et l'abandonner
à Rwamagana pour
continuer la route ». Lorsqu'il se rendit compte qu'il avait sous-
estimé le FPR, il préféra aller exercer son opportunisme sous
d'autres cieux.
Le collectif AJIIR (Action pour une justice internationale
impartiale pour le Rwanda) est dirigé par Jean-Marie Vianney
Ndagijimana, ministre éphémère, en 1994, du
gouvernement de
transition.
Dans la banlieue de Lille, JMV Ndagijimana disait
benoîtement à
l'assistance : « qui n'a rien perdu en 1994 ? » « Personne »,
répondait l'assistance. « Vous voyez bien, continuait–il
benoîtement, qu'il ne faut pas parler du génocide des Tutsis, mais
d'un génocide rwandais ». Présenté ainsi la négation du génocide des
Tutsis passait inaperçu grâce à l'habileté d'un diplomate. Envoyé
ravitailler ses ambassades, il préféra prendre le magot pour viatique
et retourner se planquer en son pays préféré, la France, où il avait
représenté Habyarimana et le MRND. Ce fin connaisseur
estimait que
c'était le lieu le plus sûr pour les âmes tourmentées par le génocide.
Habile homme, il parvint à séduire Carla del Ponte alors
procureur du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et à
la convaincre qu'une mort pendant la guerre équivaut à un génocide.
JMV Ndagijimana venait de fonder son « Collectif pour
une justice
internationale impartiale pour le Rwanda (JIIR) où « impartiale »
signifie que tuer un Hutu en bataille rangée et commettre un génocide
cela revient au même. Et la procureure séduite, de
réclamer le
jugement à Arusha, de ceux qui avaient commis le génocide (parrains
du RDR et aujourd'hui membres d'Inkingi), avec ceux
qui avaient
combattu le génocide (FPR). JMV Ndagijimana est
aujourd'hui le 2e VP
d'Inkingi qui, après Carla
de Ponte, donne des états d'âme à la porte-
parole du SG de l'ONU. Ce diplomate failli est décidément le bourreau
des cœurs
sensibles.
Le comité de la fédération INKINGI est ainsi constitué : Victoire
Ingabire (RDR) est présidente, (avec la fougue de son
père Joseph
Gitera, fondateur de l'APROSOMA)
; Eugène Ndahayo (FRD) est VP1, JMV
Ndagijimana (AJIIR) est VP2 tandis que Mberabahizi (ADR) est SG du
mouvement.
Tels sont les gens qui fournissent à l'ONU « des informations
troublantes » sur la moralité des gens appelés à de hautes fonctions
internationales. Tels sont les gens qui réclament la confiance des
Rwandais et la crédibilité de la communauté internationale.
DOCTRINE.
Le programme du mouvement fédéré INKINGI est de rassenbler
l'opposition à Kigali, de définir une action concertée et de mener
une résistance active contre le régime de Kigali qu'ils appellent
le « régime FPR ». Un raccourci que pratiquent bien d'autres qui se
veulent plus malins qu'avertis !
A la réunion de Bruxelles toutefois, en octobre 2006, «
rassembler l'opposition » n'a pas tout à fait réussi : s'abstinrent
ou furent écartés le PDR (Party for Democracy in Rwanda) de
Rusesabagina pour oganisation
encore embryonnaire (sic), les FDLR
(Forces démocratiques pour la Libération du Rwanda) « parce que
divisées » (sic), le Partenariat – Intwari « parce
qu'il y a des
Tutsis » (sic) , ainsi que le mouvement monarchique de Joseph
Ndahimana qui mène une vie assoupie.
NAISSANCE DE MINORISA-
INSHUTI
EN ESPAGNE.
Lors du démantèlement des camps de « réfugiés » au Nord Kivu par
la nouvelle armée rwandaise, un groupe de réfugiés se replia en
Espagne avec l'aide de CARITAS ; ils y furent accueillis par
l'association Minorisa et fondèrent ensemble
l'association Minorisa-
Inshuti qui gère un site internet
de même nom, fréquenté surtout par
les négationnistes du génocide des Tutsis et par les tenants du
double génocide au Rwanda.
Minorisa-Inshuti, en effet, nie le génocide des
Tutsis et affirme
qu'il se déroule au Rwanda un génocide des Hutus encore aujourd'hui.
Sur le même site (le 30.4.2002), Desouter estime que,
pour ce qui
s'est passé au Rwanda en 1994, il y a « usage usurpé du terme
génocide ». C'est de Minorisa-Inshuti, c'est-à-dire
des cousins
d'Inkingi rentrés des camps du Nord-Kivu,
que vient l'initiative de
déposer plainte contre l'Armée patriotique rwandaises (APR) pour
génocide, crime de guerre et crimes contre l'humanité au Rwanda et au
Zaire. Leur avocat est Me Jordi Palou-Loverdos,
qu'on a entendu
récemment sur les ondes dans l'affaire du Géneral Karenzi Karake.
Un peu comme le diable devenu ermite, les filleuls des FAR sont
aujourd'hui réunis pour prêcher la justice et lutter pour les droits
de la personne humaine.
Rien n'indique pourtant que, après tant de vicissitudes et à
travers tant d'avatars, ceux qui composent aujourd'hui le
rassemblement Inkingi ont renoncé, les uns (RDR, -ex
FAR) à leurs
intentions de génocide total et se sont déjà débarrassés de ceux qui
ont du sang sur les mains. Ni si les autres (FRD) ont renoncé à
l'heritage du MDR-P réuni à
Ruhengeri (le 18 mai 1960) pour sommer
les « coloniaux Tutsi de race ethiopoïde » de rentrer
chez eux en
Ethiopie par terre ou par fleuve. Ni si les autres, comme la
présidente d'INKINGI, ont renié le décalogue du père Gitera, le
leader de l'Aprosoma, quand il proclamait en
septembre 1959 les « dix
commandements du Hutu », d'une haine raciale à côté desquels « les
dix commandements des Bahutu » de Kangura,
en décembre 1990, ne sont
que des voeux de premier communiant.
Ce qu'on peut constater, c'est la même hargne haineuse, la même
détermination à en découdre. Ce n'est certainement pas la célébration
annuelle de Kamarampaka, (le referendum de 1961 qui
mit au pouvoir
l'Aprosoma et le Parmehutu)
symbole de l'exclusion, qui pourra
arranger les choses.
Servilien Manzi Sebesoni. Kigali 18.9.2007