Lettre aux citoyens français et aux personnalités françaises victimes de la campagne de diabolisation et de chantage orchestrée par le régime de Paul Kagame

 

Washington D.C. le 11 mars 2018

Objet : chantage à la France par la diabolisation de son armée et de certaines personnalités politiques.

 

La rumeur diplomatique prétend que le Président Emmanuel Macron pourrait se rendre au Rwanda en avril 2018. Mi-février 2018, Madame Laura Flessel-Colovic, la Ministre des sports du Président Macron a visité le Rwanda. Elle a déclaré qu'il y avait beaucoup à apprendre du "modèle de développement du Rwanda" et que le Président Kagame est" indispensable "sur les questions de l'Afrique.

Avant elle, l'ancien Président Nicolas Sarkozy a fait le 15 janvier 2018 une visite, inattendue et non annoncée, qui a été qualifiée de «voyage d'affaires», semble-t-il pour promouvoir l'investissement français au Rwanda. Plus tôt en 2010, lors de sa visite officielle au Rwanda, le Président Sarkozy avait fait un mea culpa indirect et timide de la France dans le rôle de son pays dans les événements tragiques de 1994.

Si la visite annoncée du Président Macron se déroulait dans le cadre de relations diplomatiques normales, cela ne causerait le moindre problème. Après tout, qui ne voudrait pas recevoir le Président de la France, une nation aussi importante dans l'histoire, influente dans les affaires du monde contemporain, et un pilier de l'Union européenne? La question qu’il convient de se poser est la suivante : le Président Macron marcherait-il sur les traces de l'ancien Président américain Bill Clinton, et de l'ancien Premier Ministre britannique Tony Blair ou bien d'autres apologétiques dans le monde occidental qui sont devenus des protecteurs et des thuriféraires du régime du Président Kagame sur la scène mondiale ?

Le problème est que les relations entre la France et le Rwanda sont bien loin des relations diplomatiques normales mais plutôt une anomalie. Le problème est enraciné dans l'histoire, en particulier le tournant de 1994. C'est une histoire parsemée d'acteurs changeants, de sentiments de culpabilité, d'intérêts personnels, et oui, voire de racisme. Cinq Présidents français (François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, François Hollande et Emmanuel Macron) ont eu à traiter avec le Rwanda comme s'il s'agissait d'une épine dans la chair de la France, en partie auto-infligée, et largement imposée par le Président Kagame.

Le seul élément permanent du dernier quart de siècle dans les relations franco-rwandaises est le Président Kagame ainsi que la version erronée du Front patriotique rwandais / Directoire du renseignement militaire (FPR-DMI). L'essence de la version calculée du récit de Kagame-FPR-DMI est que les extrémistes Hutu ont assassiné leur chef, le Président Juvénal Habyarimana, afin de déclencher le génocide contre les Tutsi. Le récit affirme que la France faisait partie intégrante de cette conspiration, et qu'elle est donc complice du génocide contre les Tutsi.

Pour le Président Kagame et son FPR / DMI, toute tentative de faire la lumière sur l'assassinat de deux Présidents africains, de citoyens français et de hauts dirigeants du Rwanda et du Burundi le 6 avril 1994 et d’établir la restitution complète des événements tragiques qui ont suivi (y compris le génocide contre les Hutu) est une menace existentielle du régime de Kigali qui doit être combattue par ce dernier avec toutes les ressources disponibles.

À cet égard, le Président Kagame a bien aiguisé ses armes en fabriquant des rapports agressifs qui tentent de qualifier des dirigeants politiques et militaires français de génocidaires (Mucyo Report, 2008, Muse Report, 2018); en bannissant le français comme langue d'enseignement au Rwanda pendant près de 100 ans; en expulsant un ambassadeur français au Rwanda; en versant des fortunes aux universitaires, aux médias et à des organisations de la société civile pour amplifier cette version erronée; la diffamation du Parti socialiste français et des institutions françaises (notamment l'armée); en mobilisant les Tutsi contre la France en tant que leur éternel ennemi; en pointant du doigt les zones sombres de l'histoire coloniale de la France (Algérie, Indochine) pour galvaniser des sentiments anti-français en Afrique et au-delà.

Tout dirigeant français qui ignorerait cette leçon de base se mettrait de lui-même du mauvais côté de l'histoire et risquerait d'être jugé durement par les futures générations de Rwandais, de Français et par l'humanité en général.

L'erreur fatale de la France au Rwanda avant, pendant et après 1994 n'est pas d'avoir commis un génocide au Rwanda. Notre organisation ISHAKWE - Rwanda Freedom Movement sait pertinemment que la France n'a pas commis et n'est pas complice du génocide contre les Tutsi.

La principale grave erreur de la France en 1994 et depuis lors est qu'elle n’a pas su lire les signes d'un moment historique et décider d’abandonner une relation toxique avec une force politique génocidaire et réactionnaire (MRND / CDR) pour s'aligner sur les forces progressistes de l'avenir. C'est le piège peu enviable dans lequel la Belgique, les Etats-Unis et le Royaume-Uni se sont engouffrés à des moments différents du contact du Rwanda avec le monde occidental.

Le régime minoritaire Tutsi Kagame-FPR-DMI est la mutation récente et plus meurtrière du régime majoritaire Hutu du MRND/CDR. L'offensive incessante du Président Kagame contre une France faiblement défensive a généré l'une des trois réponses: indifférence insouciante et silence, apaisement du pouvoir Tutsi Kagame-FRP/DMI dans l'espoir que l'épine dans la chair disparaisse d'elle-même, espoir nostalgique du rétablissement d'un pouvoir Hutu au Rwanda par une minorité d’acteurs français.

Quelle est la tendance que représente le Président Macron: indifférence et silence, apaisement du pouvoir Tutsi ou nostalgie du pouvoir Hutu?

Lorsque le Président Macron se rendra au Rwanda pendant la semaine de commémoration du génocide contre les Tutsi en avril, il ne se rendra pas sur une terre vierge. Il s'aventurera sur une terre sainte, sous laquelle se trouvent des ossements de millions de Rwandais morts (Hutu, Tutsi et Twa). Cependant, on lui montrera des crânes de morts et on lui dira que ce sont des victimes Tutsi du génocide.

Nous disons au Président Macron de ne pas se laisser berner. Premièrement, il est interdit dans la tradition rwandaise d’exposer des ossements. Il s’agit même d’un sacrilège.

Deuxièmement, nous le disons avec certitude : ces squelettes incluent aussi des restes non reconnus des victimes du génocide contre les Hutu, perpétré par ses hôtes, à savoir Kagame et son système FPR-DMI.

Les crânes de nos mères et de nos frères tués que vous verrez font partie intégrante de la stratégie d'auto-marketing de Kagame comme étant le seul héros d'une fausse histoire de miracle rwandaise à la Singapour.

Le Président Macron marchera également dans un champ de mines historique et politique à Kigali. A son actif, M. Macron est assez jeune pour se dégager des bagages du passé et se représenter avec une imagination créatrice, tout au moins, le contour d'une nouvelle relation franco-rwandaise dans l'ère post-Kagame.

Une relation franco-rwandaise durable, transparente, ouverte, mutuellement bénéfique et authentique doit être ancrée sur les intérêts aussi bien des citoyens rwandais que français. Le silence, l'apaisement ou la nostalgie ne peuvent être le fondement stratégique solide d'une relation durable.

Comme objectif stratégique, la France et le Rwanda devraient embrasser leurs passés avec honnêteté. Ceci n'arrivera qu'après le régime de Kagame et du FPR/DMI.

La France est une nation reconnue pour sa grandeur dans la philosophie, la science et la technologie. Elle connaît le poids des promesses et des attentes brisées des révolutions sociales humaines. Elle sait que même des grandes nations ont des moments de chute, de faiblesse ou de défaite. Elle sait quand des grands et des petits pays nécessitent ou demandent de l'aide dans leurs plus grands moments de besoin.

Le Rwanda est à la croisée des chemins que la France a connus par le passé. Pour nous, nous construisons l'avenir du Rwanda en reconnaissant le traumatisme que nous nous sommes infligés pour commencer à guérir, à réconcilier et à construire une société rwandaise juste, libre, équitable, démocratique, inclusive, pacifique et prospère.

La grande question que le Président Macron devrait se poser sur le Rwanda est la suivante: fera-t-il partie de cette vision de l'avenir du Rwanda, exprimée dans des relations franco-rwandaises audacieuses et novatrices, fondées sur la vérité mais non prises en otage par le passé?

Ou fera-t-il plus de mal en se taisant, en apaisant Kagame, en nourrissant des émotions nostalgiques et en se condamnant ainsi lui-même et la France à un jugement sévère de l'histoire?

C'est le moment pour le Président Macron de décider judicieusement.

 

Ishakwe – Rwanda Freedom Movement

Dr Théogène Rudasingwa

Président